[Entrainement] Rasetsu no Ken : Tora !

Il est des moments dans la vie d’un homme où celui-ci se remémore les épisodes de son passé. Confrontant l’immense solitude qui caractérisait son enfance comme son présent, Eizo s’était fait une raison et ne cherchait rien de plus que la tranquillité alors qu’il vidait seul, sous le regard désabusé de la lune, une énième bouteille d’alcool fort. Il n’existait pas de psychologue ou d’assistant social dans le monde des ninjas à même de soulager les tourments d’êtres humains gagnant leurs vies en prenant celles des autres. Pas dans le monde ni dans la conscience du Jinchuuriki de Rokubi en tout cas. Alors à défaut, Okamura noyait son début de crise existentielle dans l’alcool de riz, après avoir épuisé son corps sur des machines de musculation ou lors d’exercices de frappes aussi divers que variés.

La sueur ne collait plus sa peau depuis longtemps, mais le Bretteur de la Brume n’avait pas jugé bon de passer un vêtement sur son torse mis à nu. Son épiderme luisant sous la blancheur de la lune était plus tendu que jamais par ses muscles qui ne cessaient de gagner en volume. Dans cette immensité de chair pâle, de sombre érosions se faisaient plus que jamais apparentes, les cicatrices d’une vie de combat, de douleur et de survie pour tenter de devenir le plus fort. Il n’avait jamais été commun, surtout depuis que son défunt Maitre ne lui ôte sa paisible existence pour le plonger dans l’enfer terrestre de Rusukaina Island. Surtout depuis qu’il l’avait coupé de ses racines pour en faire une arme.

Exilé sur l’île de son tourment, le jeune Kirien devint le disciple caché de Shiliew, un des plus redoutables Épéistes de la Brume, qui lui intima de survivre, par tous les moyens et à tous prix. Survivre, apprendre à vivre, à se battre, à comprendre chaque mouvement des animaux et autres êtres sauvages peuplant l’île suivant les situations, apprendre à lire leurs mouvements, à lire leurs esprits ! A devenir le prédateur, celui que tout le monde craindra, celui que personne ne pourra surmonter. Pendant les 12 années qui suivirent, le dernier Okamura restera sur cette ile, à s'entrainer chaque jour, à déjouer les pièges mortelles de son maitre, à le combattre et le fuir, affrontant les créatures peuplant l'ile, les tuant pour se nourrir, ne dormant presque plus, réveillé qu’il était par l'arrivée de son maitre, épée en main, qui en voulait après sa vie. Il s'entrainait jours et nuits, que son maitre soit là ou non pour le torturer. Au point d’en zébrer son corps de cicatrices et d’ainsi graver dans sa chair un incalculable nombre d’histoires …

Avalant une nouvelle salve de gorgées d’alcool sur un rythme ahurissant, le numéro deux du village de la brume sanglante laissa plus lourdement encore son dos se poser contre la cloison sur laquelle il était appuyé. Le jardin de la propriété de son Maitre, dont il avait hérité à sa mort, aspirait à offrir une paix salvatrice en contradiction avec l’image que pouvait renvoyer son ancien propriétaire. L’image seulement, car Eizo avait finalement vu autre chose chez ce Sabreur de la Brume qui avait remplit le rôle de père de substitution. Une carpe vint troubler la surface de l’étang de plaisance qui bordait la terrasse de bois sur laquelle Okamura semblait bien perdre son temps. Rivant son regard couleur sang sur les cercles concentriques ridant l’eau, cette dernière renvoya au bretteur sa propre image et ce reflet fit sourire Eizo. Il fixa intensément la cicatrice qui striait son flanc droit et ses abdominaux. La vue de ce « trophée » le fit alors basculer sur la pente du souvenir …

L’épaisse voûte de feuilles caduques formait un rempart efficace contre les rayons du faible soleil hivernal extérieur. Nul vent sous les arbres voutés, la moindre brise se trouvait piégée entre les premiers avatars végétaux de l’épaisse forêt couvrant en partie l’île Rusukaina. Les épais troncs noueux s’entortillaient plus qu’ils ne s’élevaient vers le ciel, donnant l’impression que la moindre végétation était atteinte d’un mal communicatif. Au sol, les quelques parcelles de mousse d’un vert malade contrastaient avec le sombre sol terne. Les longues branches recroquevillées entre elles donnaient l’impression de doigts décharnés s’agrippant entre eux. Sous des bourrasques plus fortes on pouvait entendre les bois sec crisser alors que l’eau croupie de la neige fondue se ridait à peine en surface. Quelques nappes d’un froid brouillard se laissaient porter dans cet air sentant fort la putréfaction et le sang auquel on aurait mêlé quelques parts de souffre. De toutes les contrées de l’île, celle ci était bien la plus immonde, cette forêt des horreurs ayant poussé sur le charnier résultant d’immémoriaux champs de bataille, préludes aux Grandes Guerres Ninjas …

Seule devant une carcasse putréfiée, une silhouette brunie par la crasse immonde arrachait des bouts de chairs encore chaudes qu’il enfournait à l’aide de ses doigts difformes dans sa bouche aux dents aussi pointues qu’irrégulières. Le visage de la créature était barbouillé de sang caillé et ses yeux jaunes ne quittaient pas leur repoussant repas. Au loin, un oiseau se mit à battre des ailes pour fuir les lieux ce qui attira l’attention du ripailleur. Dépliant ses jambes maigres et arquées, la créature s’avança dans la direction alors qu’une seconde semblable émergeait de buissons séchés en poussant un râle immonde de sa bouche démesurée par rapport à ses petits yeux noirs. La première créature s’avançait avec l’expression des prédateurs qui s’apprêtent à faire un bon repas. Malgré son dos voûté, l’abomination était d’une taille impressionnante, prés de deux fois celle d’un homme, mais on constatait un bon nombre de malformation sur ce corps qui, autrefois, devait avoir quelque chose d’humain ou de simiesque …

Son épiderme encrassé se voyait relevé par des lames nacrées enfoncées à même la peau tel de funestes trophées ou bien de vomitifs symboles d’une antique croyance alors que l’os de sa clavicule avait perforé le muscle de l’intérieur pour permettre à cette immonde excroissance organique de voir le jour … Humant l’air de ses narines à peine semblable à des fentes dans ce visage aplati, la créature ne cessait d’avancer vers sa proie, dans un silence inquiétant alors que ses jambes difformes fendaient la placide surface de l’eau croupie. Certaines des bandes de peau de bête qui couvraient le corps de l’immondice tombèrent légèrement au contact de l’eau, dévoilant des zones de chair putréfiées comme gangrénées. En silence, la créature avançait, mais soudain, elle se stoppa … Sous l’eau, sa jambe avait rencontrée un obstacle.

Dans une gerbe d’eau, ses longs cheveux sombres de l’époque sur son visage, Eizo émergea de ces eaux troubles. Rabattant sa virevoltante chevelure en arrière d’un rapide mouvement de tête afin de jouir d’une visibilité nouvelle, son cri furieux heurta celui bestial de la créature. Son visage d’adolescent pourtant animé d’aucune forme de haine se voyait renforcé, comme éclairé, d’une expression terrifiante imposée par un passé de survie et de violence. Une vieille lame rouillée, empruntée à anonyme squelette mi-enterré sur l’île, et tenue à deux mains, le Kirien décrivit un arc de cercle parfait, épousant le bras tendu de la créature avec le fil de sa lame de fortune, terminant sa courbe dans une gerbe de sang et laissant la créature hurlante de douleur comme simple manchot alors que le bras de cette dernière se plongeait dans les eaux ténébreuses bientôt teintées de sang …

Les muscles tendus, le jeune Okamura effectuait son ballet de mort habituel, traçant de la pointe de sa lame un large sillon sur le torse crasseux de cet homme-singe atteint de gigantisme. Le bruit caractéristique d’un corps qui s’enfonce dans l’eau à la suite d’une course violente parvint aux oreilles du disciple forcé de Shiliew, signe que la seconde créature fondait sur lui, sans pour autant qu’il n’en paraisse troubler. Comme si tout dans cette situation n’était qu’affreuse banalité.

Mais banalité ne fut point le vif mouvement de bras de cet immondice blessées qui appliqua la loi du Talion sur le jeune bretteur de la brume. Le dernier Okamura levait haut son épée qui épousa le mouvement du bras adverse, remontant le long de l’os apparent sur ce dernier dans une gerbe d’étincelles alors que la lame du jeune bretteur rougissait sous les forces de frottements. Il mimait ainsi l’une des attitudes de son Maitre qu’il avait pu observer lors de leurs innombrables joutes. Mais alors que la sombre lame fendait le crâne de la première horreur en s’enfonçant dans sa bouche difforme, gratifiant Eizo d’une gerbe de sang sombre sur le visage, le simiesque mutant agonisant stria toutefois le flanc et les abdominaux du futur second de la Mizukage de ses doigts griffus, y traçant définitivement une plaie qui se muerait en cicatrice visible. Une moue de douleur sur le visage, Eizo finit par serrer son Katana de fortune contre sa poitrine devant sa première victime qui tombait à genoux. Pas de place pour le repos, un autre combat l’attendait de nouveau …

Le Souten no Ken venait d’ôter la vie d’une nouvelle créature surnaturelle marchant sur cette île des horreurs … Mais ce récit date de nombreuses années auparavant, des années durant lesquelles Eizo n’était rien d’autre qu’un bleu, un débutant sans expérience, un combattant certes talentueux mais incapable de juger si ses coups avaient la force ou non d’ôter la vie en un instant et de lui donner l’assurance de ne plus subir le moindre dommage. Ce ne fut point le cas en l’instant.

Désireux de se préoccuper immédiatement de son second adversaire, celui qui n’était pas encore le Jinchuuriki de Rokubi ôtait donc la lame de son Katana de fortune hors de la bouche béante de son adversaire difforme atteint de gigantisme. Une bouche bardée de dents plus semblables à des crocs et dans laquelle pendait mollement une langue sanguinolente. De ses yeux Rubis, le jeune Eizo décrivit un circulaire regard pour mieux apercevoir la seconde immondice au loin qui amorçait une folle course en sa direction, muée qu’elle était par ses instincts de prédation mais également bridée par l’immersion de son corps dans l’eau croupie.

Toujours en finir avec une cible avant de se préoccuper de la suivante, c’est un des enseignements qu’aura définitivement gravé l’île Rusukaina sur le corps comme dans l’esprit d’Eizo. Car si le jeune homme n’avait pas déjà commencé à faire passer ses réflexes dans le domaine du surnaturel, il ne serait plus là pour se souvenir de ses erreurs passées et s’en nourrir pour toujours plus progresser. Une affolante quantité de sang coulant de sa bouche, la créature blessée ne tarda pas à pousser un rugissement mue en un immonde gargouillis alors qu’elle animant son ultime bras plus simiesques qu’humains pour se saisir d’Okamura et en faire son repas. Mais la bête était aussi diminuée que maladroite et le jeune adolescent à l’épée rouillée amorça une feinte de corps pour ne plus avoir à craindre la morsure des doigts de l’immondice sur sa peau.

Pivotant sur son bassin, sans se déplacer énormément, le futur Bretteur de la Brume esquiva avec finesse dans un subtil mouvement de recul qui singeait une attitude de vipère se dérobant pour mieux assener une redoutable blessure de ses crochets. De l’eau jusqu’aux genoux, l’adolescent manieur de sabre rongé par la rouille multipliait les petits pas pour opposer un minimum de résistance à son effort physique et ainsi gagner en vitesse alors que son adversaire faisait tout l’inverse. Cette attitude, il la tenait encore et toujours des observations qu’il avait pu faire lors de ses sempiternels affrontements contre son autoproclamé Sensei Shiliew. Adoptant l’attitude de l’eau sur les plumes d’un canard en somme, glissant plus que pénétrant dans la placide surface liquide pour ne pas ralentir la dispense du coup de grâce.

Bête affreuse autant que pitoyable combattant, le gargantuesque habitant de l’île de Rusukaina ne cherchait plus qu’à imprimer douleur et brutalité sur le corps élancé du futur bretteur de la Brume. Un coup de pied singeant un Big Boot propre au champ lexical du Catch partit en direction du jeune homme qui ne manqua pas d’aller de l’avant, à la rencontre de ce coup puissant. Arquant son corps vers l’arrière, les bras du futur Vicous entourèrent la jambe et toute sa force imprima à ses abdominaux la farouche volonté de tourner sur un axe imaginaire, emportant le géant au sol et lui faisant mordre le fond boueux de cet immonde marécage alors que le dernier Okamura se relevait déjà et replaçait sa lame de fortune au devant de son musculeux corps d’adolescent.

Estimant que son allonge était dorénavant suffisante pour que son coup ait l’amplitude requise en vue d’en finir avec cette monstruosité, le prochain porteur de Rokubi se fit plus vif et incisif dans ses attitudes et ses mouvements. Rectiligne dans sa conduite, il pencha donc l’ensemble de son corps sur le côté, mettant tout son poids en appui sur sa jambe droite qui allait faire office de ressort puissant alors que le disciple clandestin de Shiliew disposait sa lame en parallèle à la sombre surface aqueuse qui faisait office de terrain de combat sauvage.

Tranchant de la parodie de Katana orientée vers son colossal adversaire difforme, Eizo déplia alors sa jambe d’appui avec une force incroyable, se propulsant en une fraction de seconde vers son adversaire qui tentait de se relever piteusement et couplant à cette charge violente le mouvement de ses deux bras puissants. Décochant ainsi un coup à l’herculéenne force, le dernier Okamura sentait sa lame mordre la chair de son adversaire juste au dessus de ses deux genoux. Les muscles furent entamés comme du beurre alors que les os de la créature se brisaient comme l’on déchire une simple feuille de papier.

Cette vie en Enfer n’avait fait que renforcer plus encore l’adolescent chaque jour. Éduqué par la violence et la loi de jungle, il jouissait désormais d'une vitesse égalant sa force inhumaine. D’un course rectiligne qui dura moins d’un souffle, il termina son mouvement et se retrouva donc dans le dos de la bête. Son Épée de fortune pointait vers le sol alors que ses bras aux muscles gonflés à leur maximum ruisselaient du sang qui marquait la fin de son chemin. Plus rapide que jamais, Eizo avait frappé de sa lame le monstre juste au dessus de ses genoux, "fouettant" ces derniers comme un lasso l’aurait fait. Les jambes de l’immondice furent détachées sous la puissance du choc et le tranchant de la lame. Buste et jambes séparées n’avaient toujours pas touché le sol que le jeune homme tournait la tête vers la seconde menace, certain cette fois que la première était passée de vie à trépas.

La seconde créature poursuivait sa course, défiant d’un inhumain rugissement le futur Ninja de Kiri qui serra la mâchoire pour donner une expression de haine furieuse à son visage. Un rugissement qui se fit l’écho des aboiements d’un chien non loin des appartements où Eizo s’enfonçait dans son passé. Ramené sur terre, le bras droit de la Mizukage poussa un profond soupir avant de poser son regard sur la lumineuse face de la lune ronde …

La pluie se faisait plus que jamais intense alors que le Bretteur de la Brume se tenait droit au devant de la stèle commémorant la mort de son Sensei, des années auparavant, le jour où lui même hérita de ce cadeau qui avait des allures de fardeau. Le don de Rokubi comme hôte permanent de son corps. Les gouttes d’eau tombaient sur le peu de vêtement que portait Eizo en cette tardive heure du jour et pourtant sur tôt dans la nuit. La lune jetait des regards inquiets sur la silhouette immobile du second de la Mizukage qui se murait dans une attitude de recueillement aussi propice au regret.

Ses cheveux coiffés en bataille et pointant d’ordinaire vers les cieux tourmentés retombaient dorénavant de part et d’autre de son visage, courbés qu’ils étaient par le poids des pleurs astraux manifestés sous la forme d’une foule de gouttes aussi froides que pures. S’il avait un temps frissonné, le Jinchuuriki de Rokubi ne semblait plus affecter par les facteurs extérieurs assaillants son corps. Trempé jusqu’aux os, l’ancien disciple de Shiliew ne bougeait plus d’un pouce, gardant des yeux rivés sur le nom de cet illustre Épéiste de la Brume qui lui avait pris sa famille mais lui avait, paradoxalement, donné la vie.

Plus que jamais, le porteur de Rokubi se retrouvait seul face à ses souvenirs. La situation ne lui rendait pas le moins du monde hommage, d’autant qu’il sombrait en l’instant dans un des reproches les plus courants de sa Mizukage : Eizo laissait parler ses émotions et ses sentiments. Un reproche qui lui était plus que clairement apparut suite à l’ouverture de son cœur et à l’explicitation complète des sentiments qu’il éprouvait pour Mei et qui ne lui avaient valut que du refus et mépris. Il s’était alors juré de redevenir ce que son maitre avait voulu faire de lui …

Si les Ninjas sont des messagers de mort, lui plus que quiconque ce doit d’être la personnification même de la grande faucheuse. Son regard de braise redeviendrait glacial et quasiment toute émotion en serait absente. Il devait redevenir le prédateur, celui que tout le monde craindra, celui que personne ne pourra surmonter. Le prédateur qui prend les vies tel le grand océan : de façon violente et impitoyable ... L’arme Kirienne, le Jinchuuriki utile à son village, le second efficace. Une initiative peu étonnante car Eizo est toujours à la recherche d'adversaire de valeur pour mettre à l'épreuve sa force !

La principale raison pour laquelle il avait été couvert de cicatrises durant son enfance et son adolescence. Pas de place pour la douceur, pas de place pour la faiblesse . Pas pour le Public d’Eizo. Pour son privé … S’était différent. Seul, il pouvait laisser de côté cette image que le village souhaitait lui imposer, cette étiquette de meurtrier aussi dangereux que silencieux qui le poussait dans la catégorie des résidus de l’ancien régime asservi à la nouvelle direction. Bien qu’il ne fut rien en réalité, il était de bon ton de cultiver les apparences. Sortant une cigarette et un briquet de sa poche, le Bretteur de la Brume plaça la petite colonne de tabac bien vite trempée à sa bouche, ayant les plus grandes peines du monde à l’allumer de son zippo argenté. L’acharnement qu’il manifesta de ses doigts sur le système d’allumage força donc le Ninja de Rang Supérieur à déplacer son corps pour enfin allumer son petit plaisir coupable. Et ce mouvement plaça son avant bras gauche au devant de ses yeux, lui renvoyant l’image d’une autre des cicatrices zébrant son corps.

Les souvenirs affluèrent et le Ninja se revit alors bien jeune, seul au beau milieu de l’île Rusukaina. Comment il avait eu sa peau marquée en cet endroit, il ne s’en souvenait que trop bien … L’action prenait place alors que le jeune Eizo avait une énorme mangue accrochée à la branche d’un arbre à l’épais tronc juste au dessus de sa tête. Le Bretteur de Brume sourit intérieurement en se remémorant ce spectacle qui lui faisait le même effet à chaque fois, la nature était joueuse et sauvage ici … En fait d’un arbre, Okamura avait face à lui une simple branche, énorme certes, mais la branche d’un arbre de taille colossale aux immenses et noueuses racines implantées à même la roche d’une paroi abrupte descendant à la verticale sur plusieurs centaines de mètres vers un lac en contrebas bien grand, parsemé de petites îles et de taches vertes, de la végétation sans doute.

Mais ce fruit sucré qui constitutait une source d’énergie considérable pour sa survie n’était pas des plus discrets dans son implantation et c’est donc sans surprise que l’adolescent déjà meurtri par de longues années de lutte se vit opposé à un autre être affamé et désireux de faire sien ce précieux élément de surcis dans leur existance rythmée par les aléas de la chaine alimentaire difficile imposée par l’île sombre qui était leur domicile … L’autre amateur de sucre avait tout sauf une gueule de porte bonheur et il exprimait un seul sentiment aux yeux d’Okamura.

La peur … C’est la seul expression qui peignait les traits du jeune Eizo en cet instant. Effrayé par le musculeux et impressionnant Mandrill qui lui faisait face et dont les immenses canines se dévoilaient dans un cri qui n’appelait qu’a la frayeur. D’une esthétique roulade initiée par un seul esprit de survie, Okamura ne subit pas le féroce coup de patte que comptait lui adresser son simiesque opposant. Armé d’un sabre rouillé, l’adolescent musculeux se redressa pour offrir un semblant de garde pour s’opposer à cet animal furieux. Une nouvelle fois, l’impressionnant singe fondit sur l’être humain pour le frapper de ses long bras et Eizo lui offrit le fil de la lame de fortune comme opposition.

Mais bien que l’arme façonnée par le monde des hommes ai marqué profondément les bras de l’avatar de la nature, la force de ce dernier fut suffisant pour définitivement faire rendre l’âme à cette arme déjà suffisamment éprouvée. Blessé, la fureur du Mandrill n’en fut que plus grande alors qu’il se projetait toujours plus vers l’avant, ouvrant sa gueule gargantuesquement pour mieux la refermer sur le crâne d’un Eizo prit de panique. Dans un reflexe humain, le futur Bras Droit de Mei opposa donc son bras gauche aux canines du fauve qui épousa donc les chairs de son opposant afin de les marquer définitivement de sa marque.

La douleur assaillit le futur Bretteur de la Brume qui n’élargit que plus encore la morsure en tentant de se dégager à la force de son bras. Mais le simiesque querelleur ne semblait pas le moins du monde disposé à lâcher sa prise. Le sang d’Eizo coulait sur les babines du monstre qui ne cherchait plus qu’a remuer la tête avec force pour définitivement arracher le muscle saillant du futur Jinchuuriki. Et comme pour priver le jeune homme de toute portie de secours, il referme ses bras puissant sur sa taille, soulevant le jeune homme de terre comme s’il n’était qu’un simple fétu de paille. Son sort semblait bien scéllé … Mais le jeune Okamura ne comptait pas finir manchot à son jeune âge et il ne manqua donc pas de réagir par pur instinct.

Enfonçant avec autant de force que de bassesse, à même de lui valoir son futur surnom de Vicious, le pommeau de son katana de fortune dans l’œil le plus proche du monstre, Eizo força donc ce dernier à relâcher définitivement sa prise dans un cri de douleur mêlé de rage qui présageait d’une réaction furieuse et incontrôlable. Sans lame pour offrir une résistance tranchante à son adversaire, Okamura était condamné à subir ses attaques jusqu’à ce que mort s’en suive. Il ne lui restait plus qu’une seule option topographique couplée à la ruse. Il devait profiter du terrain pour propulser le singe féroce dans le semblant de ravin !

Sa lame brisée au niveau de la garde, le futur Porteur de Rokubi ne pouvait plus compter que sur la force de ses bras et sur la garde de son arme décédée. Il n’y avait pas deux façon, pour Eizo du moins, de s’opposer à une force pareille : ce n’était qu’en opposant une force supérieure ! Alors, quand le singe éborgné se jeta sur lui la bave aux lèvres pour lui porter le coup de grâce, Eizo se déroba, échappant aux doigts griffus de sa Némésis du moment et rassemblant tout son courage comme sa force dans le coup de garde qu’il porta aux flancs du Singe atteint de Gigantisme. L’adolescent se surprit lui-même de la force qu’il pouvait déployer alors que les pieds de son adversaire se décollaient du sol et qu’il était propulsé dans le vide, amorçant une chute vers le lac en contrebas dans un cri qui sonnait comme une délivrance pour Eizo.

Haletant, son bras en sang et marqué définitivement par la morsure du singe féroce, Eizo constata amèrement que son arme de fortune était définitivement hors d’usage. La jetant au loin, il se jura de bien vite en trouver une de substitution. Car en ce jour, il venait de découvrir que la lame n’était pas la seule partie utile d’un sabre. Et ceci lui vaudrait de ce sortir d’une foultitude de situation difficiles dans sa carrière de Shinobi. Alors qu’il refermait sa bouche sur son avant bras en sang, buvant son propre sang, Okamura s’en retournait vers les forêts intérieures à l’île. Il venait juste de gagner un temps de répit …