Du rififi chez les jeunots !

Enfin le grand jour était arrivé, Enishi pouvait marcher et même courir normalement sans qu’un plâtre ou un pansement ne le gênent. Il était resté ainsi presque deux semaines, allant de son lit à sa cuisine et vis versa, ne pouvant difficilement faire autre chose. Son nez restait en revanche assez douloureux et à chaque fois qu’il tentait de le toucher pour voir dans quel état il pouvait être, sa quête de lunettes lui revenaient à l’esprit. Il préférait oublier définitivement les événements qui s’étaient produit ce jour là, par honte certainement mais aussi pas mépris pour une femme pourtant si magnifique. Rien que d’imaginer sa longue chevelure blonde mettait Enishi dans tous ses états, même s’il en venait à vouloir la tuer quelques secondes après. *Mon beau visage ne retrouvera peut être jamais toute sa splendeur à cause de cette stupide porte !*.

A rester pendant autant de temps enfermé, le jeune ninja ressentait, et on peut facilement le comprendre, une pressante envie de se dépenser. Et pour cela, rien de mieux que de rejoindre le dojo de son grand-père pour échanger quelques coups. Il emprunta donc son parcours habituel, qui le menait chez son marchand de fruits lui aussi habituel, et n’oublia pas en partant de saluer sa mère avec tout l’amour qu’il lui portait. Finalement, une scène matinale plutôt banale pour Enishi qui savourait d’ores et déjà une succulente pomme. Il se souvint cependant que la dernière pomme qu’il avait acheté lui avait valu de courir après une fillette pour l’empêcher de se noyer dans de l’alcool. Il pensa donc un instant que ce fruit pouvait être le perturbateur officiel de sa vie tranquille, la malédiction sucrée dont il ne pouvait en fin de compte pas se passer.

Le grand malheur ne tarda effectivement pas, le temps qu’il fallait à Enishi pour attaquer une pomme à moitié en fait – c'est-à-dire bien peu. Alors qu’il s’apprêtait à rejoindre la route le conduisant au dojo de son grand-père, une bande de jeunes hommes, visiblement peu sympathiques, s’approcha dans sa direction. Ils portaient des vêtements sombres, des masques, des casquettes ou encore des lunettes elles aussi foncées. Ils ressemblaient à l’un de ces gangs qui sévissent dans certains villages dénués de forces ninjas, prêt à tout pour étendre leur zone d’influence. Mais leur jeune âge, et les boutons à moitiés dissimulés sous leurs costumes ridicules, leurs donnaient plus une allure d’adolescents jouant aux cow-boys qu’à des véritables malfrats. Et pourtant, alors qu’Enishi rangeait déjà sa pomme dans un sac pour être prêt à les combattre si jamais ils approchaient, ils entrèrent dans l’épicerie proche de l’étale de fruits de son cher ami.

Cette boutique, la petite Yin en était sortit sous la forme d’une véritable déesse, c’était pour cette raison que le jeune ninja s’en souvenait si bien, du magasin comme du vendeur. Il savait également qu’on y trouvait de tout, des bonbons jusqu’à l’alcool, que prisait tant la fillette, en passant par des glaces quand le temps s’y prêtait. Mais il se demandait tout de même si cette bande de baby-délinquants allaient simplement faire leurs emplettes ou s’ils s’apprêtaient à commettre un mauvais coup. Agissant donc tel un véritable justicier prêt à tout pour combattre le crime, Enishi alla déposer son sac de pommes chez son ami vendeur le temps de régler cette affaire, puis il glissa subtilement – du moins subtilement à la manière d’Enishi, c'est-à-dire avec des roulades grossières et absolument loin d’être discrètes – jusqu’à hauteur de la boutique.

Il savait que si ces bandits de seconde zone devaient accomplir quoi que ce soit de mauvais, ils devraient de toute façon ressortir par l’unique issue du magasin. Le jeune ninja s’improvisa donc une planque derrière un arbre à peine plus gros que lui et guetta pendant quelques minutes, prêt à bondir tel un chat sur un rat. Mais finalement quelqu’un semblait l’avoir devancé dans son entreprise. En effet, un autre ninja, selon le bandeau qu’il portait, venait de sortir rapidement de la boutique, poursuivit par les pseudo-yakuzas qu’Enishi voulait tant combattre. Ils semblaient tous enragés, comme si le jeune ninja les avait offensé avec la pire des insultes. Certains dégainèrent même des bâtons de bois comme pour l’intimider. Il ne semblait pas l’être, à vrai dire cette situation pouvait plutôt paraitre hilarante en voyant qui étaient les méchants de l’histoire. Mais le shinobi mystérieux restait tout de même en bien mauvaise posture, le nombre jouant en sa défaveur. Une intervention du beau blond allait donc sans doute être nécessaire.

Les jours passaient et se ressemblaient dans le paisible village du Kumo. Aujourd’hui, on était samedi et l’académie était par conséquent fermée, laissant Tsuki libre comme l’air. Son père ne lui avait pas demandé dans rester dans le quartier des Hari pour un quelconque entrainement, l’enfant lui ayant fait par de son désir de s’entrainer avec le nouvel alpha, Masahiro. Content des efforts de son fils, Matsuda n’avait pas posé d’oppositions au fait que son descendant aille se promener. Il lui avait seulement fait promettre de rentrer à une heure décente. Le louveteau avait donné sa parole mais tout le monde savait qu’il n’en ferait, trop friand d’embêtements et autres. D’ailleurs, les ennuis avaient toujours tendance à le trouver, même s’il avait décidé de passer une journée calme et sereine. Ce jour ne faisait pas vraiment exception aux autres. Voilà comment une simple promenade s’était transformée en redressement de tord, mettant en scène un nouveau protagoniste avec notre loupiot international.

Il faisait une chaleur à faire cuir un œuf sur le moindre métal et, avec son écharpe enroulée autour du cou et ses vêtements noirs, Aoi était bien plus atteint que les autres. Il était resté un bon moment à l’ombre, cherchant à apaiser le feu qui le consumait de toute part, en vain. L’espace de quelques secondes, l’idée de faire trempette dans les nombreux lacs près de la frontière le tenta. Or, le chemin était long et il n’arriverait jamais à destination avec le climat infernal qu’il faisait ces derniers temps. Arpentant les ruelles enflammées par l’astre solaire, le loup noir s’arrêta un instant prêt d’un stand de fruit, la langue pendante. Ainsi, les cheveux collées sur le front par la sueur, le marchant de fruit eut pitié du pauvre enfant qui crevait littéralement de chaud. Il prit l’une des ses pommes et la lui tendit. Le jeune Hari regarda le fruit rouge un moment et l’avala en quelques bouchées, ne laissant même pas le rognon. Légèrement rafraichi, le gamin exprima sa reconnaissance.

- Arigato, Oji-san.

Lui donnant une pièce pour payer ce qu’il avait mangé, Ao continua son chemin pour enfin arriver à la destination qu’il convoitait : une épicerie climatisée. Il y entra, se dirigea instinctivement vers la partie des aliments surgelés, priant pour qu’avec ce climat, toute la population n’ait pas pensé comme lui. Heureusement, il restait ce qu’il était venu chercher : un esquimau et le dernier de tout le congélateur. Il le prit et se dirigea aussitôt vers la caisse pour payer son achat quand un groupe de délinquants fit son apparition. Comment ils savaient qu’ils étaient des malfrats ? A leur apparence dépravée, au langage vulgaire qu’ils utilisaient entre eux et aux regards fourbes qu’ils échangeaient entre eux en riant du coup qu’ils préparaient : un vol. Un élément qui ne laissa pas l’enfant loup de marbre.

Ces idiots avaient bien mal choisi leur jour. Tsuki haïssait bien des choses, le vol et le mensonge se battaient pour le sommet de cette liste. Si souvent, il ne réagissait pas aux insultes, aux moqueries et autres sottises de la même eau, le fils de la lune devenait d’une violence digne de la bête sauvage pour laquelle on le prenait généralement. Sortant du magasin en léchant avidement sa glace, de manière à ne pas lui permettre de fondre trop rapidement, il attendit patiemment que sortent les voyous qui commettaient leur terrible forfait, ignorant qu’un bourreau se trouvait au tournant. Ils ne tardèrent pas à quitter le lieu du crime riant à gorge déployée tandis que le gérant criait au voleur. Ce dernier n’avait rien à craindre car si la police de Kumo n’était pas là, des justiciers bien moins charitables veillaient au grain. Le leader du groupe de ce groupe d’infâmes fut le premier à voir la lumière du jour et par conséquent le premier à recevoir sa sentence. Alors qu’il entamait sa course pour se réfugier loin de la loi, il trébucha et s’étala de tout son long sur le sol poussiéreux. Il s’apprêtait à se relever quand Tsuki lui marcha dessus, essuya ses pieds comme on le faisait avec un paillasson avant de s’éloigner d’un air nonchalant. Se retournant brusquement, un sourire carnassier étirant la commissure de ses lèvres, le loupiot dit d’une voix à la fois pleine d’innocence et de mépris.

- Oh ! Je pensais que j’écrasais une malheureuse blatte. Bah… à vue de nez, il n’y a pas de grande différence, vous sentez tous les deux aussi fort.

Piqué au vif par une telle insulte, le chef se releva d’un bond et fonça sur le loup qui le regardait d’un air dédaigneux et supérieur. S’écartant légèrement en laissant trainer son pied, il fit de nouveau trébucher le minable voleur qui ne tarda pas à comprendre qu’il n’arriverait à rien à main nue et seul. D’un geste, Tsuki fut encerclé par la bande toute entière, ce qui voulait dire par 6 à 8 personnes, mais ne broncha pas pour autant. Bien au contraire, cela l’amusa et il ne cacha pas son euphorie en riant de plus belle face à cet acte bien futile. Se mettant en position de combat, sa glace dans sa bouche, dégageant une aura meurtrière, il fit signe aux brigands se s’avancer. Ces derniers furent hésitants en voyant le radical changement qui venait de se produire sous leurs pupilles qui commençaient à se dilater par la peur. S’amusant de la situation, le jeune Hari poussa un grondement qui fit sursauter au moins la moitié des inutiles qui l’entouraient.

- Si tu veux avoir ta part, je te conseille de descendre tout de suite. Car quand je commencerais mon châtiment, je me m’arrêterais qu’après avoir botter le cul de chacun de ses petits merdeux.

Contrairement à ce que le jeune homme caché dans l’arbre pensait, Aoi l’avait remarqué dès l’instant où il avait quitté l’épicerie. Il avait aussi senti l’horreur que lui inspirait l’acte des criminels qui pensaient que le nombre les aideraient. Attendant l’initiative de son compère pour commencer les hostilités, le loup noir ne perdait cependant pas de vue les déchets de la société qui allaient recevoir son courroux.

Quelle drôle de situation ! Enishi, qui pensait avoir trouvé la meilleur cachette du monde, se retrouva démasqué sans rien pouvoir faire. Le jeune ninja qui venait de sortir de l’épicerie n’en était visiblement pas à son coup d’essai, il savait ce qu’il faisait et de quoi il était capable. Il était même parvenu à sentir quelles étaient les intentions réelles d’Enishi. En effet, le voir ainsi caché pouvait aussi bien faire penser à un justicier en attente du bon moment pour surgir qu’à un complice des malfrats faisant le guet. Mais le jeune homme semblait avoir comme décrypté l’aura justicière de son compère et c’était pour cela qu’il avait lancé :

- Si tu veux avoir ta part, je te conseille de descendre tout de suite.

Il était décidément prêt à en découdre avec ces individus qui ne parvenaient visiblement même pas à l’effrayer. Enishi, quant à lui, était tiraillé entre déception et colère. Il s’en voulait d’avoir été débusqué aussi facilement et il en voulait à ce jeune ninja de l’avoir débusqué. Au fond de lui il pensait intervenir au moment où son collègue serait dans le plus mauvais des pétrins, surmonté par le nombre de ses adversaires, permettant ainsi à Enishi de sortir de sa planque de manière héroïque. Mais sa position était maintenant mise à nue, ce qui le ridiculisa au plus haut point. Il se demanda alors comment il pouvait surgir dans l’action sans paraitre plus idiot qu’il ne l’était déjà, mais son temps de réflexion fut écourté par le sourire d’un des voyous qui, étonné par ce que le jeune ninja venait de lancer dans le vide, avait fini par remarquer Enishi. Ce visage moqueur mit celui-ci hors de lui et il trouva finalement comment faire son entrée :

- Espèce de sac à merde ! Je vais t’apprendre à te foutre de ma gueule !

Avait crié Enishi après avoir prit quelques pas d’élan et s’être lancé dans les airs le pied en avant. Celui-ci vint se planter dans le visage de l’apprenti brigand qui, surprit par la soudaineté de cet acte, en perdit quelques dents. Sur les huit vauriens qui encerclaient le jeune ninja, il n’en restait donc plus que sept. Il aurait été étonnant que celui à terre se relève, et même si cela avait été le cas, il aurait suffit d’une pichenette pour l’y renvoyer. La situation restait cependant tendue. Même si les pseudo-yakuzas avaient une cible de plus à éliminer, ils n’en restaient pas moins en surnombre. L’arrivée d’Enishi avait toutefois eu l’avantage de répartir cet avantage numérique, puisque trois d’entre eux changèrent de cible, passant du ninja mystérieux au donneur de coups de pied.

- Alors comme ça on veut jouer dans la cour des grands les enfants ? Vous avez osé nous attaquer, alors maintenant il va falloir assum …. Gnfff !

Enishi n’avait pas attendu que le supposé chef de la bande finisse sa phrase. Il avait lancé son poing directement dans son nez, juste après avoir fait un petit bond, qu’il s’empressa d’ailleurs de faire en sens inverse une fois son forfait accompli.

- Tu crois vraiment que tu nous intéresse face de rat ?

La réaction des voyous ne tarda pas, trois foncèrent sur Enishi, et trois autres sur le jeune ninja, pendant que leur boss tenait son nez brisé et lançait des insultes à tout va. Le point le plus dangereux dans l’attaque de ces adolescent en mal d’action n’était pas leur nombre mais leurs armes. Il était assez facile pour Enishi d’encaisser plusieurs de leurs coups à mains nues, mais un morceau de bois, aussi fragile était-il, pouvait faire beaucoup de dégâts s’il était correctement utilisé. Ne voulant pas prendre de risque, Enishi recula donc par petits pas de sorte à laisser de l’espace entre lui et chaque adversaire. Ainsi, en les faisant venir un à par un, il avait toutes ses chances d’esquiver ou de parer les coups. D’autant plus que seuls deux des trois gredins qui l’attaquaient été équipés. Le troisième pensait sans doute être suffisamment fort pour pouvoir combattre avec ses poings, mais Enishi avait bien l’intention de leur montrer la réelle puissance d’un corps entrainé.

Les animaux sont de vrais détecteurs de mensonges, vous le saviez ? Non, pour dire vrai, le corps humain est le pire ennemi du menteur ou de toute personne cherchant à dissimuler quelque chose. Pour un animal, particulièrement pour les félins et les canidés, les humains avaient une odeur différente pour chaque émotion qu’ils ressentaient. Aussi, Tsuki sentit aussi le fait que son camarade de jeu se fut blessé, humilié d’avoir été découvert aussi vite. S’il lui avait gâché un effet de surprise, le loup noir s’en excuserait, mais il ne pouvait pas faire autrement. Si l’attitude de l’enfant prouver qu’il avait en rien besoin d’aide, ce dernier étant bien trop orgueilleux pour en faire la demande, il ne fallait pas être idiot pour se rendre compte qu’il aurait eu de sérieux difficulté à sortir de ce combat indemne. Cependant l second justicier du jour se remit bien vite de son offense et se lança aussitôt dans la mêlée.

Son coup de pied d’entrée avait mis hors-jeu l’un des inutiles qui s’était aussi moqué de sa tentative vaine de se cacher. Son arrivée divisa très vite le groupe, une majeure partie ayant décidé que le nouveau venu serait plus facile à avoir. Il se rendrait compte, à leurs dépends sans doute, qu’ils avaient choisit la cible la plus compliqué à abattre. Le chef vit d’ailleurs cette évidence quand son beau discours de brute épaisse fut interrompu par un joli coup de poing dans sa face de vermine. Son nez se mit immédiatement à saigner et ses camarades passèrent à l’attaque. Regardant ce qui se passait à coté, Aoi fut surpris la première attaque qui lui tomba dessus sous la forme de coup de bâton au niveau de la tête. Il entendit au dernier moment le vent siffler et n’eut pas le loisir d’esquiver un assaut aussi minable. Mais il ne se fit pas toucher pour autant.


En effet, instinctivement, il leva le bras pour contrer le coup qui lui aurait surement causé de plus ample dégâts qu’il l’avait reçu au cou. S’il eut mal, le loupiot n’en montra rien, se contentant de tourner lentement la tête vers l’instigateur de cette attaque en traire. Son regard argenté se posa sur sa première victime, un feu bleu dansant sur la mer d’argent, un spectacle à en couper le souffle. Dans ce cas précis, celui qui tenait le bâton fut pris d’une terreur inexpliquée, que même le jeune Hari ne put comprendre. Décidant de poser les questions plus tard, il profita de cet instant de faiblesse pour lui subtiliser son arme et le mettre hors d’état de nuire. Passant son bras autour du bois, le gardant dans le creux de son coude, le louveteau frappa le cou de l’insignifiant devant lui, main ouverte, doigts serrés. Le souffle court, le brigand lâche le bâton pour tenir son cou qui le faisait souffrir, laissant l’opportunité à l’animal de l’achever en un joli coup de pied rotatif qui lui faucha la tête et l’envoya aussitôt dans les bras de Morphée.


- Alors, c’est qui le prochain ? demanda le fils d’Alpha avec un regard de bête affamée.

Les adversaires qui lui restaient reculèrent d’un pas, de plus en plus effrayé par ce gamin à la glace. D’ailleurs, le chef de la bande, qui se trouvait dans le dos du jeune loup, voyait comme agissait celui qui l’avait humilié, bien plus que ne l’avait fait le nouveau venu en montrant le bout de son nez. Il braillait toujours à tue-tête des insultes à ses sbires qui ne tarderaient pas à mordre la poussière. Plein d’un élan de rage de couardise, il sortit un canif de sa poche et fonça sur le jeune homme qui lui tournait le dos. Mais c’était bien mal connaître l’enfant lune que de croire qu’il se laisserait empaler dans un acte aussi traitre. L’odeur du sang emplit les narines de Tsuki qui comprit aussitôt ce qui allait lui arriver s’il n’agissait pas au plus vite. De plus, cette fragrance avait le don de le rendre plus enragé encore, un peu comme un fauve ou un requin qu’on appâtait avec un morceau de viande crue. Effectuant un superbe salto arrière, le loupiot esquiva l’attaque qui aurait pu lui être fatale et abaissa le bâton sur la tête de la vermine qui eut l’idée d’un coup si fourbe. La douleur ramollit sa prise sur son couteau suisse et permit à l’animal de le désarmer en assénant un nouveau coup sur sa main.

S’approchant du lâche, le loup noir le fit tomber au sol en fauchant ses pieds. S’immobilisant au niveau de la jambe droite, Ao laissa brusquement son genou tomber sur la jambe, en y mettant tout son poids. Le chef ne cria pas, comme pour prouver qu’il était brave ou autre, mais frappa le sol et jurant qu’il se vengerait. Le jeune aspirant ne lui avait rien brisé, mais avait fait en sorte de frapper assez fort pour la douleur l’immobilise le temps qu’il s’occupe de ses compères. Devant le nouvel affront qui venait d’être fait à leur leader, les deux peureux de tout à l’heure reprirent courage et fondirent sur le loup avec la ferme idée de venger leur supérieur. Mordant un bout dans sa glace, ignorant royalement l’assaut qui se préparait sur lui, il attendit patiemment que ses proies soient à portée de lui. Le châtiment ne faisait que commencer après tout.

Le jeune inconnu s’en sortait visiblement très bien, bloquant les coups de bâtons et ripostant aussi sec avec une grande adresse. Cela rassurait donc Enishi qui ne savait pas de quoi son partenaire d’un temps pouvait être capable, et qui s’inquiétait donc quant à l’issu de ce match urbain. Il dû cependant se remettre rapidement dans le combat qui était le sien, car ses adversaires n’attendaient qu’un instant d’inattention de sa part pour l’attaquer. Ils étaient tous comme enragés, physiquement faibles mais mentalement fous. Enishi savait parfaitement comment un duel se déroulait. Il savait comment analyser les mouvements de son adversaire, comment profiter de sa force pour le blesser et comment le pousser à l’abandon. Tout ceci grâce à ses entraînements dans le dojo de son grand-père. Mais il ne savait pas comment les combats de rue pouvaient se dérouler. Il s’était déjà battu plusieurs fois contre des élèves de sa classe à l’académie, contre d’autres dojos venant affronter le sien, mais jamais contre de tels brigands.

Il hésitait donc à rester totalement sur ses gardes et à prendre chaque adversaire pour un danger potentiel, ou à se laisser aller quitte à prendre quelques coups. Ce qu’il craignait le plus fut que l’un d’entre eux puisse sortir une arme blanche, comme le chef de la bande l’avait d’ailleurs fait. Entre les mains de tels idiots un couteau n’était plus ni moins qu’un moyen de dissuasion, mais un coup de lame, même placé maladroitement, pouvait avoir des conséquences gravissimes. Enishi décida donc de rester prudent, continuant à reculer par petits bonds.

- Tu t’défiles blondinet hei … Ptshfff !

C’était le moment qu’attendait patiemment Enishi. Sa stratégie, vu le nombre de ses adversaires, était de les disperser en prenant un peu de distance, puis de les agacer pour les pousser à se détourner du combat, en parlant par exemple. Ce court instant où le pseudo-délinquant ouvrit la bouche suffit à Enishi pour lui envoyer un coup de pied digne des plus grands taekwondoïstes. Il avait simplement eut à lever la jambe à une vitesse folle et à frapper avant que l’homme n’ai fini sa phrase, sans quoi il aurait regagné en vigilance. C’est ainsi que le corps humain réagit, par signaux envoyés au cerveau où ils sont traités et auxquels celui-ci envoi une réponse. On ne peut alors peut être pas savoir s’il est possible de faire plusieurs choses en même temps, mais il était sûr pour Enishi que le manque de concentration porté par le fait de parler aurait une incidence sur les réflexes de son adversaire.

La puissance de cette percussion sembla démonter la mâchoire du pauvre voyou qui s’étala aussi sec sur le sol. La douleur le faisait se tortiller dans tous les sens en poussant des « aïe » ou des « 'ai mawl ! » à moitié mangés par la perte de diction que provoque en général ce type de blessure. Il semblait même sur le point de pleurer mais le fait de voir ses compagnons autour de lui l’en empêchait, par impression d’avoir encore une chance de gagner ou bien simplement par honte. En tous cas, les voyous restants ne tardèrent pas à réagir en attaquant tout deux en même temps, suite à cette frappe inattendue. Malheureusement pour lui, Enishi avait éliminé le seul ne possédant pas d’arme, il se retrouva donc harcelé par deux bouts de bois simultanément. *Un par la droite, l’autre par le haut*.

Le jeune genin voulait parfaitement analyser la situation pour pouvoir venir à bout de ce combat avec sa prochaine action. Il élabora donc un plan aussi vite que possible pour éviter d’être blessé et pour éliminer ses adversaires à la fois. Plusieurs images lui vinrent à l’esprit en tant qu’hypothèses mais il n’avait pas le temps de faire le tri et il du réagir vite. Le brigand A, frappant verticalement avec son pseudo-sabre, était le plus en avant, il était donc logique de la parer en premier. Enishi bloqua le sabre avec ses mains dès qu’il fut à sa portée - *Ouaille !*, comme il l’avait gémit dans son esprit pour ne pas avoir l’air d’une fillette – puis il força Mr. A qui le tenait encore à le changer de direction. Le bois vint donc bloquer celui de Mr. B, qui attaquait par la droite d’Enishi. La première phase du plan du jeune ninja, la partie défensive, avait donc parfaitement fonctionné, il ne lui restait alors plus qu’à passer à la partie offensive. La solution la plus simple qui s’offrait à lui fut de tirer un bon coup sur la bois qu’il avait attrapé pour le défaire de l’emprise du brigand A, pour repousser un peu l’arme du brigand B et surtout pour renvoyer une frappe de titan dans la tempe de Mr.A, qui, lui, s’évanouit tout de suite après avoir chu.

Il ne restait donc plus qu’un des apprentis yakuzas sur les trois qui l’avaient prit pour cible. Et celui-ci, plutôt que de tenter une nouvelle attaque dans la garde mise à nue d’Enishi, qui venait de mettre un coup, préféra s’enfuir dans « Beuheuheu » révélateur d’une envie de pleurer mêlée à une envie de survivre. Enishi, qui savait alors parfaitement quoi faire, attendit que le brigand soit à une distance pouvant justifier un exploit de sa part, avant de lancer le bâton qu’il tenait dans les mains. Celui-ci virevolta dans les airs jusqu’à atteindre, à une allure foudroyante, le sommet du crâne du voyou, qui fini par se fracasser contre le sol en une multitude de tonneaux. Enishi put alors lancer un grand « Wouhou ! » à l’assemblée, en levant les bras au ciel, en signe de victoire.

Il venait donc de terminer sa partie du travail concernant cette bande de petits délinquants, et il pouvait constater que son camarade du jour allait sans doute en faire autant rapidement. Enishi décida par conséquent de se rapprocher du leader de la bande, gisant sur le sol avec une jambe handicapée, pour lui exprimer son point de vue sur la situation dans laquelle ils se trouvaient tous.

La bagarre ne semblait pas vouloir durer, au grand malheur de Tsuki qui commençait à prendre gout à la raclée qu’il leur donnait. Il était à la moitié de sa glace quand les deux derniers adversaires qui lui restaient arrivèrent à sa hauteur. Ils enchainèrent plusieurs attaques de conserves que le loup m’était sans difficulté aucune en échec. Il esquivait ou parait chacune des attaques avec une agilité que même un singe jalouserait. Les deux brigands faiblissaient cependant, bien moins habitué que l’enfant à batailler comme ils étaient en train de le faire. Le rythme décadent ennuya bien vite notre jeune ami qui ne tarda pas à prendre l’initiative de mettre fin à tout ce manège. Lâchant le bâton qui ne faisait qu’office de décor dans ses mains, le ninja de Kumo esquiva la dernière attaque avec un salto avant. Atterrissant dans le dos des deux ignorants, il leva les mains et les frappa violemment au niveau du cou, ce qui les assomma aussi sec.

Dépassant les corps qui venaient de s’effondrer devant lui, Aoi ôta sa glace de sa bouche pour recommencer à la lécher. Il ramassa sur son chemin le canif du chef qu’il regarda un moment avant de le lancer de nouveau. Ce dernier alla se planter entre les jambes du voleur que le blond avait mis hors-jeu en faisant une entrée en fanfare. Il venait de se réveiller et pensait être capable de beaucoup à lui seul, ce qui était évidemment impossible. D’ailleurs le loup noir le lui fit clairement comprendre en posant sur lui un regard affamé qu’on pouvait traduire de biens des manières. Le pickpocket se releva en tremblant et prit la fuite, empruntant le même chemin que ces prédécesseurs. Contrairement aux autres, il ne retint pas ses larmes et tout le village aurait pu l’entendre geindre qu’il était tombé nez à nez avec un démon. Le fils du couple Alpha ne fit pas attention aux paroles futiles que le perdant versait sur son passage et reporta son attention à son partenaire du jour.

Ce dernier s’occupait du chef, immobile et d’une humeur assez désagréable. Il jurait encore qu’il se vengerait –comme s’il en était capable – et que les deux compères auraient bien le temps de le regretter. En s’approchant en riant du soi-disant leader, un piètre personnage, il serait difficile de le voir autrement, Ao posa son pied sur la jambe qu’il avait endommagé. Cette fois-ci, il ne put retenir un cri, cri qui suffit au loup pour arrêter sa torture. Utilisant son pied, il le tourna afin qu’il soit allongé sur le dos et s’agenouilla ensuite près lui, son regard argenté empalant le misérable comme une lance givrée. En voyant les yeux du loup, le chef de la bande se raidit à un point qu’une statue aurait pu paraître plus vivante que lui. Ses lèvres bougèrent pour laisser échapper une phrase qui ressemblait plus à un couinement de sourire.

- C’est toi l’enfant loup qui rôde dans les rues tard le soir et qu’on dit qu’il mange les gens qui le rendent furax ?

Tsuki ne fit pas mine de répondre, les rumeurs courant à son sujet et sur tout son clan ne lui faisait ni chaud ni froid. Et puis, il rôdait bien dans les rues, de jour comme de nuit même, quand on y repensait bien. Il se souvint même qu’il lui était arrivé de pousser un hurlement ou deux à la lune et avait failli se fait tirer comme un pigeon par la suite. Mais la seule personne qu’il avait fait mine de vouloir gober, il l’avait laissé partir sain et sauf, une fois sa colère passée. Aussitôt, il se demanda si la petite blague, certes de très mauvais gout, qu’il avait fait à Jin n’avait pas fini par s’ébruiter dans le village. Non, l’histoire n’avait pas pu prendre de telles proportions vu que ses parents et Mata ne lui en avaient rien dit. Il ne pouvait donc s’agir que d’une énième rumeur infondé sur son clan le prenant, cette fois-ci pour cible. Son attitude ennuyé qu’on confondait toujours avec un manque cruel de sociabilité voir même d’antipathie allait vraiment finir par lui porter préjudice. Mais pour l’heure, le louveteau prit la perche que l’idiot venait de lui tendre afin de lui faire comprendre manière définitive sa leçon.

- Oh ! Même les débiles comme toi me connaissent ?! C’est bien… Je ne me trompe pas en disant que tu sais ce que je vous ferais alors si j’apprends qu’on t’a vu, toi ou/et ton petit gang de pacotille, dans les parages.

Couvert de sueurs froides, le pseudo-voleur hocha la tête frénétiquement soudainement conscient que sa vie était un trésor qu’il devait chérir. Lui adressant un sourire qui dévoila une rangée de dents blanches, le Hari lui tapota la tête comme on le ferait pour féliciter un enfant pour avoir compris quelque chose de complexe. Puis il se redressa et laissa son compagnon de justice terminer le sermon qu’il avait commencé, s’occupant maintenant de chercher le butin de la bande de malfrats. Il fallait rendre au vendeur de l’épicerie ce qu’il lui appartenait, sinon, ce combat n’aurait plus vraiment de sens.

Le jeune collègue d’Enishi, qui venait de régler ses affaires avec une facilité déconcertante, enchainant cabriole sur cabriole, l’avait devancé dans son entreprise. En effet, Enishi pensait, après s’être lui-aussi débarrassé de ses assaillants, sermonner le leader de la petite bande pour lui faire comprendre comment se terminaient les choses lorsqu’on empruntait la mauvaise voie. Mais le travail du jeune ninja avait été bien suffisant, profitant d’une certaine renommée qu’ignorait totalement Enishi pour installer la crainte dans l’esprit du délinquant. Les mots ayant donc été amplement suffisants pour convaincre leur proie, Enishi passa avec la plus grande délicatesse à la partie physique de cette cérémonie. Il se saisit donc de l’apprenti brigand par le col, le souleva avec force à hauteur de son visage et le fixa un long moment droit dans les yeux, lui faisant comprendre le fond de sa pensée. Puis, une fois que la terreur, plantée par le ninja inconnu dans le cœur du pseudo-yakuza ait suffisamment germé sous le regard oppressant d’Enishi, celui-ci lui adressa, avec une profonde sincérité, un coup de tête des plus violents.

Le bougre en sortit tellement étourdi que lorsqu’Enishi le posa à terre il eut du mal à marcher droit. Ses pas étaient plus aléatoires qu’autre chose, et même si l’on sentait son envie de fuir, on voyait bien qu’il n’en avait plus la capacité. C’est donc en riant qu’Enishi lâcha un « A plus ! » à l’adolescent titubant. Il était désormais débarrassé de ces vandales qui tentaient de troubler l’ordre paisible de cette ruelle et leurs méfaits ne laisseraient bientôt plus une trace puisque son jeune collègue s’attelait déjà à rendre au gérant du magasin ce qu’ils avaient voulu dérober. Enishi l’attendit donc patiemment devant la boutique, afin de pouvoir réagir avec lui sur le combat auquel ils venaient de participer. Il ne connaissait absolument pas ce garçon, qu’il aurait pourtant pu croiser à l’académie, et ne savait rien de ses capacités. Tout ce qu’il pouvait en dire tenait dans le simple jugement qu’il pouvait faire de match. Il avait affaire à une personne droite et honnête, n’ayant pas peur des défis, capable d’user de la force avec brio et jouissant d’une réputation assez peu glorieuse.

Au bout de quelques minutes où le jeune inconnu discuta de l’action qui venait de se dérouler, le gérant sembla lui montrer une grande reconnaissance qu’il adressa également à Enishi par le biais de plusieurs courbettes consécutives. Le jeune ninja l’avait montré du doigt à un instant, sans doute pour préciser qu’il n’avait pas été le seul à agir. Cela ajoutait donc le sens du respect aux valeurs que cet individu pouvait honorer, selon Enishi. Il était en droit de penser cela car pour quelles autres raisons ce mystérieux inconnu aurait-il pu vouloir le désigner comme son partenaire ? Toujours était-il que le commerçant avait une réelle envie de remercier ses sauveurs, il ne laissait donc pas partir le jeune ninja qui commençait d’ailleurs à s’impatienter. Enishi eut un sourire car il su qu’à sa place il aurait eu le même air blasé, n’agissant pas pour qu’on le reconnaisse comme un super-héros mais simplement pour faire régner la justice la plus pure.

Voyant donc qu’il aurait peut être encore une ou deux minutes avant de pouvoir parler avec son nouveau compagnon, Enishi couru rapidement en direction de l’étalage de son marchand de fruits, à qui il avait demandé de garder son sac de pommes. Il vérifia ensuite qu’il en restait au moins deux pour pouvoir en offrir une, puis il retourna à la boutique sans plus tarder. Mais, à son grand damne, lorsqu’il arriva sur les lieux après à peine quelques pas, le garçon était déjà partit. Enishi le chercha donc dans tous les sens, ne pouvant se permettre de le laisser partir sans même savoir son nom. Il était après tout la seule personne de tout le quartier à avoir lui aussi osé se dresser contre le petit banditisme. Ce ne fut qu’après quelques regards hasardeux qu’il put enfin le trouver, en train de filer par une ruelle. Il devait avoir cru lui aussi que son partenaire d’un temps avait préféré s’en aller plutôt que d’attendre un éventuel échange. Il lui courra donc après en criant :

- Hé ! Hé attends, ne pars pas comme ça !

Tsuki ne prit quelques secondes à trouver ce qui avait été volé et se dirigea aussitôt vers l’épicerie. Pendant ce temps, son camarade de jeun lançait un dernier avertissement silencieux au chef de la bande. Avant d’ouvrir la porte, il entendit un bruit de contact qui lui fit regarder un bref instant par-dessus son épaule. Il avait craint un énième coup fourré de la part du brigand et fut soulagé de voir le jeune blond nargué le boiteux. Ce dernier utilisait la maigre parcelle de force qui lui restait pour s’éloigner du quartier aussi vite que ses jambes lui permettaient. Le voir tituber comme un ivrogne et entendre le petit adieu de son partenaire arracha un sourire au loupiot. Avec ça, il était on ne peut plus certain qu’il ne reverrait cet idiot trainer dans les environs avant plusieurs décennies. Aussi, il entreprit de terminer ses affaires en cours.

Pénétrant dans le magasin avec le sac des voleurs, l’épicier lui sauta presque au cou pour lui remercier. Faisant un geste de recul, le vieil homme comprit son erreur et calma sa fougue se contentant de sourire à outrance. Aoi lui rendit sa marchandise et s’apprêtait à s’en aller comme un voleur, quand un des clients demanda des détails. Dévisagea le louveteau de haut en bas, fixant intensément sa svelte corpulence, il vint lui aussi à se demander comment l’enfant avait pu s’occuper de la bande à lui seul. Même aidée de tierce personne, il avait du mal à croire qu’un gosse qui paraissait si faiblement battit, avait pu venir à bout de près d’une dizaine de malfrats. L’enfant lune expliqua sans omettre un seul détail l’affrontement, pointant du doigt son coéquipier pour quand il vint à parler de sa participation.

Pendant le récit, le propriétaire de l’épicerie adressa plusieurs gestes de remerciement en direction du blond qui attendait dehors. Le Hari commençait à regretter de s’être autant précipité et se cessait de se questionner sur le temps qu’on le retiendrait. Enfin, après des tapes amicales sur l’épaule pour féliciter sa bravoure et celle de son ami, l’épicier lui tendit ce qui ressemblait à deux tickets. Le fils du couple Alpha eut beau affirmer qu’il ne voulait aucune récompense, le marchant insista jusqu’à lui dire qu’il ne sortirait pas sans eux. Après un long soupir de résignation, il accepta les coupons et prit congé de la cohue qu’il entendait toujours même après avoir fermé la porte de l’épicerie. Il remarqua aussitôt que son compère, sûrement fatigué de l’attendre, avait déserté son poste et n’en fut que plus heureux.

Se mêlant à la foule, Tsuki s’engagea dans une ruelle, la même qu’il avait emprunté, il y a de cela plusieurs jours, avec Yuu. Depuis le jour où il avait découvert ce petit coin de verdure, il ne cessait de s’y rendre quand il avait besoin de calme et de sa dose quotidienne de nature. Et suite à cet affrontement qu’il aurait préféré éviter, les combats l’ennuyant toujours autant, il avait absolument besoin d’un peu de sérénité et d’une bonne sieste si les conditions le permettaient. Alors qu’il s’éloignait, dénouant son écharpe pour essayer de rafraîchir sa plaie d’enfance qui lui démangeait à cause de la chaleur, des bruits de courses attirèrent son attention et lui firent tourner la tête vers l’arrière. Voyant le blondinet lui courir après comme un dératé –un peu comme lui quand il courait après sa sœur –, le loup noir poussa un léger soupir. Arrêtant sa marche, l’aspirant attendit que son compère le rejoigne pour lui tendre les coupons donnés plus tôt par l’épicier.

- Tiens… Notre récompense… dit-il d'un ton nonchalent, déposant les tickets dans les mains de son partenaire d'un moment.

Baillant en s’étirant de tout son long, grattant la cicatrise sur sa gorge, Ao se détourna en épongeant son visage dégoulinant de sueur. Il ne se préoccupa pas vraiment du jeune homme, se doutant qu’il le suivrait afin de pouvoir converser avec lui. Le louveteau imaginait déjà les questions qui allaient lui être posées et, quitte à répondre, il ne voulait pas d’oreilles indiscrètes. Fuyant le brouhaha, le gamin bifurqua tantôt à droite à un carrefour, puis à gauche dans un autre, jetant toujours un coup d’œil derrière lui pour voir si le blondinet était toujours sur ses talons. Après plusieurs minutes, le loupiot arriva enfin sur son site favori. Avant de s’aventurer plus avant sur la végétation verdoyante, notre ami prévint son compagnon sur la difficulté de terrain.

- Fais gaffe à toi. Le sol est parfois un peu… Traitre.

Si c’était un conseil judicieux, le loup noir n’eut aucun besoin de le suivre, sa démarche animal, fluide et gracieuse, en association avec son instinct, lui permettant de survoler les obstacles naturels.