Au loup ! Au loup ! Au loup !

« Hein ? Un loup garou ?
- Mais siiiiii, j’t’assure ! C’est Mamy qui m’l’a raconté, elle parlait des clans d’Kumo et pis ben on sait pas trop, mais on dit plein d’trucs sur les Hari ! Et pis une copine m’a dit que c’était des loups garous…
- Y’en a un à l’académie, j’le connais pas, mais il a l’air normal inh…
- Hé ! C’est vrai ? C’est pleine lune ce soir, on va vérifier ? Dit oui dit oui dit oui ! »

Jin était perplexe, qu’est ce que sa petite sœur avait encore été cherché ?
Il avait bien évidemment entendu parler des clans de Kumo Gakure, mais celui des Hari était à la fois le plus ancien et le plus mystérieux de tous. On ne savait rien d’eux, et on pourrait même croire qu’ils faisaient en sorte que cela soit le cas. Toujours était-il que c’était des gens à ne surtout pas se mettre à dos.
Mais c’était trop tentant. Le coté gamin de l’aspirant mourait d’envie de suivre sa petite sœur dans son idée débile. Et pis peut-être bin que c’était vrai quand même, on dit qu’il n’y a pas de fumée sans feu… Mouais, on va prendre un nonos au cas où alors. Histoire d'avoir quelque chose à lui jeter en pâture si ça venait à sentir le roussi.

Le soir, après les cours, sa petite sœur l’attendait sourire aux lèvres et excitée comme une puce, pensez vous, elle allait faire comme les grands, pour elle, elle jouait au ninja. Par chance, en cette saison, la nuit tombait très vite, et le cours avait duré suffisamment longtemps pour que le soleil ait déjà commencé à sérieusement décliner. D’ailleurs, on était un de ses soirs où la lune et le soleil étaient tous deux présents dans les cieux. Le loup garou potentiel allait forcément passer par le centre-ville, et en toute logique, il devait forcément passer par une rue en particulier vu l’endroit où se trouvait sa maison. Voui voui, l’aspirant s’était renseigné et avait planifié tout comme un vrai ninja. Donc les deux sales gosses prièrent les devant et allèrent se planquer dans un arbre s’y trouvant.
Quelques minutes plus tard, la cible fit son apparition en amont de la rue. On ne voyait plus le soleil à l’horizon, il commençait à se faire tard. Et toujours pas de changement, pas de transformation. RAS. C’était nul, c’était pas drôle, et en plus, Jin commençait à avoir faim.

« Mais l’est toujours normal, Tu m’as encore raconté nawak soeurette…
- Attaaaaaa, si ça s’trouve, c’est à minuit ! »

L’aspirant y croyait de moins en moins, et puis en plus, à minuit, il serait chez lui le Hari. Quand tout à coup, un crac sonore se fit entendre. La branche sur laquelle se tenait sa petite sœur venait de céder, et la gamine allait tomber de bien haut… Heureusement, elle eut la brillante idée d’attraper un bout de fringue de son frangin adoré pour l’entrainer avec elle dans sa chute. Jin eut à peine le temps de faire un kinobori pour s’attacher à sa branche et stopper la dégringolade. Une petite fille pendue à son manteau. Ben là, la discrétion, c’était râpée. Grommelant la tête en bas, Jin allait tendre la main pour permettre à sa sœur de remonter sur une branche quand un bruit de chute suivi de pas de course se firent entendre.

Elle s’était barrée. Toute seule. La pute à frange.

Lui par contre, il ne s’en tirerait pas si facilement, stoppant le kinobori, il redescendit sur terre et se dirigea tout penaud et avec un sourire commerçant graver sur la trogne en direction du Hari.

« Aheum, saluuuuuut… J’suis à l’académie moi aussi, euh, ça va, tu t’en sors bien ? »

Planquer le nonos, dès fois qu’il le prendrait mal.

La flemmardise, une caractéristique bien trop tenace chez le jeune loup. Les cours à l’académie, tout ce qu’il y avait de plus ennuyeux sur terre. Dans ces conditions, il ne pouvait y avoir qu’une seule fin pour cette journée monotone : une bonne sieste sur le toit de l’académie. Les remontrances avaient déjà été nombreuses et le jeune Hari ne voulait pas encore supporter les demandes futiles de ses professeurs. Un effort monumental avait donc été obligé d’être fait, attendre la récréation pour s’éclipser une énième fois. Tsuki se moquait comme de l’an quarante de savoir si son absence serait remarquée ou non, car même si l’on arrivait à le clouer sur le banc de la salle de classe, seul Morphée aurait son attention pour leur reste de la journée. Heureusement, les choses prirent une tournure qui arrangeait tout le monde, principalement notre petit loupiot. Son sommeil fut profond et bercé par la mélopée du vent jusqu’à ce qu’une brise un peu frisquette le sorte de sa torpeur. Se levant brusquement, comme s’il venait de recevoir une gifle, le jeune Hari afficha une mine assez ennuyé. Le soleil était bas dans le ciel et ce dernier avait déjà cette teinte bleu nuit qui annonçait la fin d’une nouvelle journée. Passant la main sous son écharpe, il frotta légèrement la partie la plus lisse de sa peau, une des nombreuses habitudes ou réflexes qu’il s’était forgé au fil des ans.

- Kuso… Mata risque encore de m’engueuler…

C’était une évidence, un fait prouvé maintes fois. Le nombre de fois où il rentrait à des heures indécentes augmentait et les avertissements tombaient comme la grêle en hiver. Quitte à se faire gronder, voir punir, Aoi préférait avoir la version soft de ce qui l’attendait s’il ne se dépêchait de regagner ses appartements. Mais pourquoi un garçon de quinze ans avait-il un couvre-feu alors que dans sa famille, il était considéré comme un loup adulte ? Tout simplement parce que le loup en question avait découché tellement de fois à cause de sa manie qu’on avait un jour finit par croire qu’il était mort. Comme la vie d’un flemmard, d’un dormeur compulsif, d’un pseudo drogué aux somnifères, peut être complexe. Se jetant dans le vide pour atterrir lestement sur la branche de l’arbre géant qui surplombait la cours, notre loupiot retrouva le plancher des vaches et se dirigea d’un pas nonchalant vers la maison des Hari. Il aurait du s’activer, mettre plus de vitalité dans ses pas sachant ce qui l’attendait, mais il était aussi défaitiste qu’un condamné se rendant à l’échafaud. Une heure de plus ou de moins, qu’est ce que cela pouvait bien faire, vu que la sentence serait la même. Mais apparemment, les loups n’étaient pas les seuls à sortir les soirs de pleine lune.

L’enfant lune arrivait au coin d’un carrefour, sa maison n’était plus qu’à dix minutes de marche, vingt s’il continuait à avancer de manière si désinvolte. Il s’arrêta net, quand une succession de bruit heurta ses tympans, attirant son attention sur un spectacle que certains auraient qualifié d’hilarant. Deux enfants, l’un ayant approximativement le même âge que lui et une autre bien plus jeune, venaient de faire une chute des plus ridicules. Ils avaient apparemment mal réparti leur poids sur la branche qui les soutenait et cette dernière avait cédé en faisant un bruit très désagréable à l’oreille. Bruit qui arracha une grimace au jeune Hari. Le son de la nature qui meurt, d’un point de vue ou d’un autre, avait le don d’irriter ses oreilles, mais pas assez pour que son cerveau occulte ce dernier. Si la chute avait été freinée à l’aide d’une technique de base, le ridicule était bien présent et gonflait l’atmosphère d’une bien étrange manière. Bien trop gênée pour assumer sa bêtise, la jeune fille s’en alla, de la manière la plus lâche possible. Une action qui réussit à plisser légèrement la commissure des lèvres du jeune homme en un illusoire sourire mauvais, mais qui eut aussi pour effet d’éclaircir le mystère qui planait sur cette stupide mascarade.

*Ils me guettaient ?!*

Une évidence assez dérangeante, surtout pour quelqu’un d’aussi discret que notre cher Tsuki. Son visage afficha une mine où se mélangeait à la fois l’ennui, l’incrédulité et la suspicion, alors que le poursuivant qui restait s’approchait, embarrassé par l’échec de sa filature. Les mots qui sortirent de la bouche du garçon n’aidèrent pas notre loupiot à se montrer plus chaleureux. D’une voix un peu rauque, qui suintait l’ennui, Ao demanda :

- Les profs t’envoient ?

Vu qu’il venait de sécher une grande partie de sa journée de cours, il voyait cette tentative fourbe de poursuite comme une sorte de collecte de preuves afin de pouvoir l’accuser sans discussion possible de la dérobade dont il était coupable.

Holy shit, c’qu’il n’avait pas l’air commode du tout en plus le garçon. Peut être bien qu’elle avait raison, la soeurette, il avait l’air d’être tout prêt à le bouffer tout cru. Pas content le loup, pas content. En plus, il avait l’air de se méfier, Jin priait que c’était parce qu’il ne le trouvait pas à son goût et le soupçonnait d’être indigérable.
Pour toute réponse à son salut, le Hari évoqua les profs. Les profs ? Mais qu’est ce qu’ils avaient à voir là dedans ? Eux non plus, ils n’étaient pas bons à manger pourtant… Un p’tit bout de Darui, beurk beurk. Mais ce n’était sans doute pas de nourriture dont voulait parler l’aspirant en face de lui… Les profs avaient quelque chose à lui reprocher ? Ooooh, attends un tout p’tit peu là, ça ne serait pas une opportunité pour Jin de ne pas se faire manger tout cru par le loup ? Oh bah si, la bonne perche que voilà ! D’une part, il avait là une autre raison moins débile de l’avoir guetté, et en plus il allait même avoir des arguments de son coté.
Il soupira d’un air complètement exaspéré, et tapa du pied dans un caillou qui se trouvait là en fourrant les mains dans ses poches, comme un fautif prit en flagrant délit, avant de répliquer d’un ton agacé.

« Et ouais, c’est tout à fait ça ! Pfff, nan mais franchement, sérieux, qu’est ce que t’as bien pu faire pour qu’les profs me fassent poireauter des heures à guetter ton passage, inh ? inh ? »

Règle number one de Mamy : plus tu en sais sur ce qui taraude les autres, et mieux tu te portes ! S’il posait la question, c’était qu’il avait forcément quelque chose à se reprocher. Au pire, l’aspirant en face de lui l’enverrait balader, ce qui déjà en soit confirmerait d’une certaine façon cette évidence, ou sinon mieux, il le lui dirait. Bon, ce n’était pas tout ça, mais fallait pas non plus trop indisposer le Hari, bah oui, il risquerait encore plus de vouloir manger Jin s’il le prenait pour une menace professorale potentielle… Surtout que maintenant, le gamin venait de tilter un truc : si les profs lui en voulaient, c’était peut être parce que le loup avait déjà frappé ! Oui oui ma p’tite dame, sans doute que l’autre élève là dont l’absence avait déjà duré plus d’une semaine, on disait qu’il était malade, mais c’était en fait le Hari le responsable ! Han, rien n’échappe au détective Jin Holmes… Sauf qu’il allait devoir cacher sa découverte, sinon le loup garou allait chercher à faire disparaitre les preuves. De toute façon, s’il le tuait, l’Uryu se vengerait, il écrirait avec son sang sur le sol que c’était la faute au loup et puis les profs le verrait. Et toc ! Mais il n’avait quand même pas envie de se faire dévorer, alors renchainant sur un ton plus décontracte, l’aspirant entreprit de détourner la conversation.

« Bon allez, j’aime pas trop les profs non plus, alors tu m’manges pas et j’vais faire comme si je t’avais pas vu. Mais dit, t’es un Hari, c’est vrai que vous… euh… Vous êtes plutôt costaud inh ? »

Le gamin avait failli demander quelque chose du genre « c’est vrai que vous êtes des bêbêtes qui mangent les gens les nuits de pleine lune ? », ce qui était, remarquons le, un manque de tact incroyable quand la bêbête en question était en face de vous.
Au pire, le nonos était toujours là.

En plus d’adorer écouter, Tsuki aimait pas mal regarder aussi. Un animal utilise toujours ses sens avec un maximum d’efficacité et les Hari, en tant que loup, n’échappaient pas à cette règle. Dès que la lueur de sa sœur la lune montra chaque parcelle du visage de son interlocuteur, le jeune loup ne cessa de le fixer. En effet, il avait parlé des profs parce que c’était la seule hypothèse un temps soit peu plausible qui lui venait à l’esprit. Mais l’incrédulité qui transparaissait dans les moindres gestes insignifiants vint tout de suite prouver l’inexactitude de ses pensées. Il ne l’aurait pas suivi aussi sciemment sans avoir une raison tangible. Alors le prédateur continua à inspecter sa proie. Inconsciemment, l’enfant lune huma l’air qui l’entourait dans lequel se trouvait aussi l’odeur de l’aspirant que se trouvait devant lui. Son sourcil s’arqua et le sourire mauvais qui était furtivement passé sur ses lèvres se maintint. Aoi venait de flairer un jeu qui pouvait le distraire. Malgré l’air faussement agacé que prit le jeune homme par la suite pour répondre au loup garou, ce dernier ne se laissa pas prendre et tissait déjà la toile dans laquelle sa proie se débattrait bientôt.

- Tu pus la peur et le mensonge… Tu as du faire quelque chose de bien pire que moi pour accepter un requête aussi puérile. A moins… Que ce ne soit moi qui t’effraie. Tu sais ce que je fais aux gens qui me mentent ?

Habituellement, pas grand-chose, pensa tout bas Ao. Sur cette dernière phrase, le regard argenté du canidé se fit aussi froid et dur qu’un iceberg. Généralement, le jeune Hari faisait tout ce qui était en son pouvoir pour paraitre le moins animal possible, à cause de ses complexes. Mais ceux-ci ne seraient jamais assez puissants pour l’empêcher de profiter d’un truc nouveau. On ne l’avait jamais crains ou trouvé terrifiant, bizarre, dérangeant, peut-être collant, mais jamais terrifiant. Il était le seul à se voir ainsi, comme un monstre, comme le croquemitaine qui se cache le soir sous les lits de enfants pour se nourrir de la peur qu’il leurs inspirait. Une partie de lui-même, bien trop infime pour freiner ses ardeurs, trouvait cela dégoutant, d’être excité par la peur de quelqu’un, bestial, inhumain. Mais, humain, il ne l’était pas, pas entièrement, pas assez pour arrêter l’entreprise quelque peu cruelle dans laquelle il se lançait.

Une nouvelle fois, la voix de son interlocuteur résonna, un son calme qui dissimulait mal ce qui se lisait dans ses yeux et sur ses traits. Il se trahit tout seul, exposant de manière assez comique la raison pour laquelle il avait mis en place tout ce manège. Une raison qui chassa la conscience de Tsuki qui protestait contre la suite évidente que prenaient les évènements. Comment ce petit vermisseau pouvait lui rappeler aussi salement que sa vraie nature était détestable ? Comment osait-il crier aussi silencieusement qu’il était un danger, alors qu’il n’en savait absolument rien. C’était la seule insulte qui le fils de la lune ne pouvait ignorer. L’imbécile ne venait pas de signer son arrêt de mort mais avait tout simplement trouvé le meilleur moyen d’avoir une vie infernale. Alors l’enfant lâcha prise, commença à se comporter comme il le devrait, comme ce qu’il était. Le loup s’avança gracieusement, comblant les quelques mètres qui les séparaient en trois enjambés qui ressemblaient plus à des pas de danses. On eut presque dit qu’il glissait sur le sol ou que ses pieds ne touchaient même pas le sol, tel une ombre furtive, un spectre hantant sa proie. La tension qui régnait autour de lui était palpable tandis qu’il découvrit une rangée de dents blanches mais qui semblait tellement dangereuse sous l’éclat de la pleine lune.

- Te manger ?!

La voix du prédateur sonna creux, comme si elle sortait des profondeurs d’une sombre caverne. Sans crier gare, il fit ouvrit la bouche pour refermer ses mâchoires à quelques millimètres du visage du jeune fou qui avait provoqué sa rage. Puis Aoi éclata de rire, une euphorie où se mêlait folie et sauvagerie, avant déclarer avec arrogance.

- Tu te crois digne de passer sous mes crocs ? Quelle prétention vermisseau. Tu n’as même pas la consistance d’une entrée. Bien que… Je pourrais faire une exception pour toi…

Passant sa langue sur ses lèvres, se délectant du festin qui se présentait devant lui, le loup se mit à tourner autour de son interlocuteur, comme un lion autour d’une gazelle inoffensive. Il voulait lui faire comprendre que l’idée de le poursuivre, sachant que cet acte serait vain, l’excitait. Qu’il serait le seul à souffrir et que l’animal serait le seul à se réjouir. Son corps, dans son ensemble, tremblait, de rage, d’impatiente et de tant d’autres sentiments qu’il n’arrivait pas à identifier. Ah ! Comme il était bon d’être celui qui domine parfois !! Et comme la bêtise humaine pouvait être amusante !!

« N’a mais oh ! C’toi qui pue d’abord ! »

Voui voui, Jin s’arrêtait souvent sur des mots de basse considération sans prêter réellement attention au reste. En même temps, on rappellera que le petit Uryu est issu d’une vaste famille de voyous en herbe sans éducation, alors les mots clés comme « puer », « tâche », « chien », et tant d’autres encore qu’une liste exhaustive serait indressable, se retrouvaient forcément agrémenter d’une réponse du style « c’toi la tâche/qui pue/le chien »… Alors que l’on demandait juste par exemple à un rejeton Uryu d’aller sortir le clébard.
Enfin, là, c’était plus une tentative désespérée de se redonner un poil de courage.
Mais bref, revenons à nos deux moutons, dont un qui a de grands yeux, de grandes oreilles et de grandes dents. Vous connaissez la suite de l’histoire. D’ailleurs, il s’amusa à faire claquer ses dents juste devant la tronche de l’aspirant, qui fit des yeux pour le coup aussi rond que la lune. Mais c’était qu’en plus, c’était vraiment sérieux depuis le début. Jin jura que s’il s’en sortait, il ne se moquerait plus jamais de sa petite sœur. L’aspirant grinça entre ses dents d’une voix inaudible.

« Et euh, j’veux pas le savoir en fait, c’que tu fais aux menteurs… »

Surtout que le forgeron en herbe mentait souvent comme un arracheur de dent. Et souvent même sans raison, c’était si marrant de mentir. Beaucoup plus que dire la vérité, parce que quand on mentait, il fallait toujours se réinventer toute une partie de sa vie, et c’était ça qu’était drôle. Enfin là, ce n’était pas drôle du tout. Le stress grandissant rendait le gamin tellement nerveux qu’il commençait à faire plein de petits gestes compulsifs et vifs. Quand Jin avait peur, il ne faisait pas parti de ceux qui restaient paralyser. Surtout que maintenant, l’autre évoquait concrètement l’éventualité de le bouffer tout en rodant autour comme un rapace affamé.
Non seulement, le loup attisait le plus possible la peur de l’aspirant, mais en plus, il venait à son tour de se moquer ouvertement du gamin. Indigne. L’histoire de la vie du morveux. Il faisait parti de ceux pour qui le simple fait de devenir aspirant est un honneur et devenir genin un chemin de croix. Il n’était qu’un petit ‘personne’ de plus sur la longue liste des postulants contrairement à tous les descendants de grandes lignées ou de ninjas reconnus. Et il n’était tellement personne que s’il se faisait manger, personne n’objecterait quoique ce soit. Tué par le loup.
Ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase, le petit rien pour enflammer toute l’huile de la peur en colère. On parlait de bêtise humaine ? Et bien un autre truc typiquement humain : quand l’Homme craint quelque chose, il change toute sa terreur en haine et il va chercher à le détruire par tout les moyens. C’était entre autre pour cette raison que les loups étaient des êtres diabolisés au possible. L’humain en avait juste peur, et il a horreur de ce ressentiment. Jin était particulièrement humain.
Le gamin plongea sa main dans son manteau pour y retirer l’os qui y était planqué et le lança au loin, à l’autre bout de la rue, là d’où venait le Hari, puis enchaîna une série de mudras.

« Kawimari no jutsu ! »

L’os retomba juste devant le loup tandis que l’aspirant se trouvait maintenant à l’autre bout de la rue, d’où il prit les jambes à son cou. S’il y avait bien une chose en laquelle le futur ninja avait confiance, c’était son jeu de jambe. En même temps, il a passé sa vie à courir pour les bêtises de Mamy. Il bouillonnait de haine et de terreur à la fois. Il devait se débarrasser du danger que représentait le loup, qu’importe le moyen, lui dictait sa peur. En le mangeant avant d’être manger lui disait sa frénésie. Si celui-ci prenait sa poursuite, il l’attendrait de pied ferme en embuscade là où il aura l’avantage. Si le Hari rentrait chez lui… Il l’attendrait demain, sur la route, qu’importe. Enfin, si l’aspirant ne l’assaillait pas d’ici là en ayant fait le tour du pâté de maison.
Le rat acculé pouvait tuer le chat. Et Jin pouvait se montrer bon rat.

Tout se passa presque trop vite pour la compréhension humaine, mais assez lentement pour la compréhension d’un loup. Tsuki comprit, à l’instant son interlocuteur s’énerva, que sa petite plaisanterie finirait en bagarre, mais pas en course-poursuite. Il avait sentit l’os depuis longtemps et s’était même demandé à quoi il servirait dans tout ce cirque, mais ce n’était qu’un détail futile qui ne retint pas longtemps son attention. Or quand l’aspirant l’utilisa pour pouvoir s’enfuir, avec un kawarimi pas trop mal exécuté, le louveteau lâcha un soupir.

- Il tient vraiment à me faire courir le bougre…

Dommage pour le camarade improvisé du jeune Aoi, il connaissait ses rues comme sa poche, vu qu’il en piétinait le sol tous les jours. De plus, les Hari, tout comme les Inuzuka, étaient connus pour leur capacité à traquer une proie. L’aspirant qui venait de prendre la fuite n’avait aucune chance de s’échapper si le jeune louveteau avait décidé de le prendre en chasse et c’était justement ce qu’il avait en tête. S’élançant à la suite du fuyard, suivant son odeur, le fils de la lune tourna à droite au carrefour où sa proie avait continué tout droit. Un petit raccourci qu’il avait expérimenté à plusieurs reprises quand il était en retard. Usant de toute sa vitesse pour être certain de surprendre le jeune homme qu’il poursuivait, le loupiot finit par arriver au prochain carrefour, tandis, qu’au loin, il sentait l’odeur de la peur qui arrivait à vive allure. Le son de pas se fit enfin entendre puis la silhouette de sa proie apparut sous la lueur diffuse des lampadaires. Se plaçant au centre de la rue, essayant de prévoir les prochains mouvements de son fuyard d’interlocuteur, le jeune Hari prit la parole, un sourire carnassier sur les lèvres.

- Tu sais… Me faire autant courir n’était pas une bonne idée. Maintenant, j’ai vraiment faim. Dire qu’au début je ne faisais que jouer… Voilà où mène ta curiosité…

Un bien vilain défaut, n’est ce pas ? Comme pour affirmer les dires du jeune loup, son ventre gronda, protestant qu’on ne l’ait pas encore rempli. Avançant à petit pas dans la faible lueur de la ruelle, Tsuki finit par afficher un sourire tout innocent.

- Tu me payes un truc à bouffer ? Parce que, soyons sérieux, même si je pouvais te manger, t’as que la peau sur les os. Jamais je n’aurais été rassasié…

Oui, c’était comme ça avec le fils du couple alpha. Il se lassait aussi vite qu’il s’enflammait. Effrayé le jeune homme avait été amusant, frustrant aussi vu les paroles qu’il avait en vain ravalé, mais cette course, alors qu’il venait de se réveiller, c’était comme une invitation à retourner se coucher .N'attendant pas la réactionde son unterlocuteur, le loup s'éloigna en s'étirant. Il n'avait pas nvie de se faire engueuler et il avait déjà dépasser de beaucoup son couvre-feu. Levant la main en signe d'au revoir, il lança une dernière réplique avant de disparaître dans le noir.

- La prochaine fois que je te croise, je te ferais penser au repas que tu me dois. A la prochaine, vermisseau!